Les hommes libres… Histoires d’hommes… et de femmes

Les parlementaires fédéraux auront à se prononcer cet automne sur le projet de simplification de la loi portant sur la répression du cannabis – plus précisément de sa consommation. Ce projet propose de punir d’une simple contravention l’adulte pris sur le fait de fumer un joint et possédant au maximum 10 grammes de résine de cannabis ou d’herbe.

TDG 100frs pour un joint (sept 2011)«L’idée repose sur une initiative parlementaire PDC. La punition immédiate des consommateurs doit simplifier le travail de la police et dispenser d’une procédure pénale pour chaque fumeur de joint.»

Le but avoué est donc de simplifier la tâche de la police et de désencombrer les tribunaux, tout en diminuant la charge pénale pour le consommateur. Derrière ce but il y a un triple aveux qu’il convient de souligner pour en tirer des conclusions.

1. La répression de la consommation de cannabis coûte cher et complique le travail des représentants de la loi, police et magistrats. Le système d’amende proposé est destiné à simplifier les procédures, à économiser du temps et de l’argent. Il a aussi un autre effet: on cesse de considérer le fumeur de joint comme un délinquant d’office. Il devient un simple contrevenant.

L’allègement de la peine signifie un allègement de la manière politique d’aborder la question du cannabis.

2. La dangerosité du cannabis n’est plus évoquée nulle part, et le passage d’une procédure à une simple amende illustre bien la position réelle des parlementaires: personne ne considère plus le cannabis comme un danger majeur pour la santé et la société. Des pays ont déjà dépénalisé l’usage de cette plante, avec comme résultat une stabilisation ou une diminution de la consommation.

On reconnaît implicitement que le chanvre n’est pas ce produit diabolique qui va rendre fous ou psychotiques ceux qui le consomment.

Cela ne signifie pas qu’il soit sans dangerosité, mais que celle-ci est faible comparativement à d’autres substances. Par exemple, au vu des conséquences sociales, sanitaires et économiques de l’alcool, la comparaison devrait logiquement signer l’arrêt de mort de celui-ci.

Les parlementaires, tout en punissant les consommateurs de chanvre de manière plus systématique:«Pas question (…) d’accorder à la police la possibilité de fermer les yeux lorsqu’elle est confrontée à un cas bénin de consommation de cannabis.», ouvrent en fait discrètement la porte à une future légalisation. En montant d’amende, fumer un joint est moins grave que dépasser la vitesse de 6 km/h dans une localité, ou dépasser de 3 à 6 mois le délai de contrôle anti-pollution.

On assiste donc à une dédramatisation du cannabis, prélude à sa légalisation dans quelques années.

TDG 100frs pour un joint (sept 2011)3. Cette amende est destinée à faire rentrer de l’agent dans les caisses de l’Etat plutôt que d’en faire sortir. C’est un pas dans la bonne direction: l’Etat doit gagner de l’argent sur le cannabis plutôt qu’en perdre.

L’étape suivante, lors de la légalisation, sera la création d’une régie d’Etat avec contrôle de la qualité et de la traçabilité, un encadrement de la vente, et la prise de recettes au profit de la collectivité plutôt qu’au profit des mafias. Cet argent pourra être affecté aux campagnes de prévention et de prise en charge des personnes dépendantes de toutes les drogues, alcool compris. Accessoirement une partie des recettes pourrait être attribuée à l’AVS. De plus la production indigène offrirait de nouveaux débouchés à l’agriculture.

Au vu de cette dédramatisation radicale du cannabis, la conclusion est qu’il faudra un jour avoir le courage de libéraliser – de manière encadrée et avec une prévention. Le but n’étant pas de répandre les drogues (elles n’ont d’ailleurs pas besoin de reconnaissance officielle pour cela!) mais d’aborder la question de manière rationnelle, en tenant compte de l’échec total de la prohibition.

Pour accélérer ce mouvement, on peut imaginer que des fumeurs verbalisés compliquent le nouveau système et contestent systématiquement les amendes. Cela enclenchera des procédures, et l’objectif de simplification sera un échec. Il ne restera alors que la voie d’un nouveau durcissement, qui n’aura plus lieu d’être car au regard de la simplification proposée il ne pourra plus être perçu que comme une mesure de rétorsion de l’Etat, ou de la légalisation et la gestion du produit par l’Etat.

Entre dépenser des millions pour rien dans des procédures inutiles conduites par des magistrats qui eux-même fument ou ont peut-être déjà fumé du cannabis, et gagner des milliards en revente et taxes, le pragmatisme devrait l’emporter. Et l’esprit libéral qui considère les adultes comme libres et responsables d’eux-mêmes sortirait vainqueur.

Parce que, franchement, cette «punition» à 100.- le joint, c’est infantilisant.

Tags: amende, argent, contravention, dangerosité, loi, police, prévention, prohibition, régie d'État, répression, suisse, tribunal

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