L’express, le 11 août 2010

Des tensions sont apparues ces dernières semaines entre le Maroc et l’Espagne, Rabat accusant des policiers espagnols de “dérives racistes” envers des ressortissants marocains et des migrants subsahariens.

Tensions entre le Maroc et l'Espagne, accusée de racisme

Clôture délimitant la frontière de l’enclave espagnole de Melilla avec le Maroc. Des tensions sont apparues ces dernières semaines entre le royaume chérifien et l’Espagne, Rabat accusant des policiers espagnols de mauvais traitements et “dérives racistes” envers des ressortissants marocains et des migrants subsahariens.(Reuters)

Depuis la mi-juillet, le gouvernement de Rabat a publié cinq communiqués dénonçant notamment le comportement des forces de sécurité espagnoles envers des ressortissants marocains dans l’enclave espagnole de Melilla, sur la Méditerranée.

Le Maroc, pays hautement stratégique pour la lutte contre l’islamisme et l’immigration clandestine, accuse également les Espagnols d’avoir abandonné vendredi dernier au large de ses côtes huit clandestins africains qui étaient “dans un état critique“.

Rabat s’est “vivement étonné” lundi que le gouvernement espagnol n’ait pas officiellement répondu à ses demandes répétées d’explications.

Quand tout cela se produit entre deux Etats voisins liés par un traité d’amitié, cela veut dire qu’on s’approche d’une nouvelle crise“, estime Taoufik Bouachrine, rédacteur en chef du journal marocain Akhbar al Youm.

La dernière crise en date entre les deux pays remonte à 2002, à propos de l’îlot Persil, près de l’enclave espagnole de Ceuta, dont Madrid et Rabat se disputent la souveraineté.

Les relations s’étaient depuis réchauffées, l’Espagne et d’autres pays européens félicitant le Maroc pour son engagement dans la lutte contre les militants islamistes – encore illustrée mercredi par l’annonce du démantèlement d’une cellule clandestine – et le trafic de drogue, ainsi que contre l’immigration clandestine.

Mais deux incidents précis ont indigné récemment les Marocains.

Dix-sept ressortissants marocains auraient subi des mauvais traitements pendant trois semaines de la part de policiers espagnols à Melilla, un “preside” espagnol enclavé au nord du Maroc, comme celui de Ceuta, et que le Maroc considère comme une ville occupée.

DÉRIVES RACISTES

La seconde affaire porte sur l’abandon au large du Maroc de huit clandestins originaires d’Afrique subsaharienne, interceptés par les policiers espagnols alors qu’ils tentaient de gagner l’Espagne.

Le royaume du Maroc s’étonne vivement qu’aucune réponse officielle n’ait été, à ce jour, apportée par les autorités espagnoles sur les différents cas de dérives racistes opérées par des éléments de police et de sécurité espagnols“, a indiqué lundi le ministère marocain des Affaires étrangères.

Les observateurs politiques s’étonnent toutefois du ton polémique pris par cette affaire, ce genre d’allégations n’ayant pas jusqu’alors provoqué une si vive réaction de la part du Maroc.

Personne à Madrid ne comprend la cause réelle de cette crise“, dit Ignacio Cembrero, journaliste au quotidien El Pais et spécialiste des relations entre les deux pays.

En privé, des responsables marocains expliquent que Rabat est agacé par un accroissement de l’activité des agents espagnols dans le nord du pays.

Le peu d’enthousiasme des autorités espagnoles, apparemment, à accueillir le nouvel ambassadeur du Maroc à Madrid pourrait également expliquer le désappointement des Marocains, dit-on de même source.

On cite également, pour expliquer cet agacement, les survols des côtes septentrionales du Maroc effectués par des hélicoptères de l’armée espagnole alors que le roi Mohammed VI était dans la région en juin et juillet derniers.

Mardi, le président du gouvernement espagnol, José Luis Rodriguez Zapatero, a promis aux Marocains “clarification, dialogue et informations” au sujet de l’attitude des policiers espagnols.

Mais pour Mohamed Larbi Mesaari, ancien ministre marocain et spécialiste des rapports entre les deux pays, Madrid a mis trop de temps à répondre aux demandes de Rabat et les derniers communiqués officiels marocains traduisent la “frustration” du royaume chérifien face à ce manque d’empressement.

Guy Kerivel pour le service français

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